Le manque de sommeil : un facteur de risque pour la maladie d’Alzheimer ?

Des chercheurs du NIH (Etats-Unis) se sont intéressés au possible lien entre le sommeil et l’accumulation cérébrale de bêta-amyloïde, un peptide (petite protéine) associé à la maladie d’Alzheimer. Les résultats de leurs travaux montrent que la perte d’une seule nuit de sommeil induit une augmentation immédiate des taux de bêta-amyloïde dans certaines régions du cerveau chez des sujets sains, en parfaite santé physique et mentale.

La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative qui se caractérise par une altération des capacités cognitives et des désordres comportementaux. Parmi les processus cérébraux associés à la maladie, l’accumulation du peptide bêta-amyloïde* est particulièrement importante, et conduit à la formation des plaques séniles, véritables marqueurs tissulaires des processus neurodégénératifs. Ainsi des stratégies limitant l’accumulation de bêta-amyloïde dans le cerveau sont actuellement à l’étude pour ralentir la progression voire prévenir les symptômes de la maladie d’Alzheimer. Dans ce cadre, la caractérisation des mécanismes impliqués dans l’accumulation cérébrale de bêta-amyloïde constitue un axe de recherche prioritaire.

Des études aussi bien sur des modèles murins que chez l’homme tendent à montrer que le sommeil exerce une influence notable sur les quantités cérébrales de bêta-amyloïde. Ainsi, chez les rongeurs, une perte aiguë de sommeil s’est révélée suffisante pour augmenter les taux cérébraux de ce peptide. Chez l’homme, des corrélations avaient également été rapportées entre des troubles/déficits du sommeil et l’accumulation cérébrale de bêta-amyloïde, mais le lien causal direct entre les deux restait à établir. La dernière publication des équipes de Ehsan Shokri-Kojori et Nora Volkow dans la revue prestigieuse PNAS pourrait bien constituer une première démonstration de l’existence de ce lien.

Ces chercheurs ont évalué les effets d’une nuit sans sommeil sur les taux de bêta-amyloïde, dans le cerveau de 20 sujets sains. Par rapport aux taux observés normalement après une nuit de sommeil, la privation de sommeil entraîne une augmentation significative de l’accumulation de bêta-amyloïde dans l’hippocampe et le thalamus, aussi bien chez l’homme que chez la femme. Or ces régions cérébrales sont parmi celles qui sont affectées par les processus neurodégénératifs associés à la maladie d’Alzheimer. Bien sûr, l’augmentation observée après cette privation aiguë de sommeil chez des sujets sains reste faible : +5%, comparée à celle observée en moyenne dans le cerveau des malades : +43%. Cependant, pour les auteurs, malgré leurs amplitudes si différentes, ces augmentations pourraient résulter d’un même mécanisme, à savoir une moindre efficacité du processus d’évacuation cérébrale du peptide bêta-amyloïde (via le réseau glymphatique). De fait, d’autres travaux ont montré que ce processus intervient surtout au cours du sommeil. Ainsi, en accord avec des données épidémiologiques obtenues par ailleurs, l’étude de Ehsan Shokri-Kojori et Nora Volkow confirme que des troubles du sommeil pourraient constituer un facteur de risque pour la maladie d’Alzheimer.

Comme le FRC l’a encore souligné à l’occasion de l’enquête grand public rapportée en mars dernier, une bonne qualité de sommeil reste l’une des clés pour préserver la bonne santé de son cerveau.


Publication : β-Amyloid accumulation in the human brain after one night of sleep deprivation. Ehsan Shokri-Kojori et al. PNAS 2018 Apr 24

Photo : © Inserm/Giannoni, Patrizia. « Dans le cerveau de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, on observe des dépôts extracellulaires du peptide amyloïde β (Aβ). »

Rédaction : Laura Gouder et Michel Hamon

« Dans le cerveau de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, on observe des dépôts extracellulaires du peptide amyloïde β (Aβ). »

© Inserm/Giannoni, Patrizia.

Le sommeil, quel impact sur notre cerveau ?

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