Une nouvelle méthode de microscopie pour étudier le cerveau

Porteur du projet : Valentina Emiliani, directrice de recherche, Université Paris Descartes

Equipement financé grâce à l’opération Rotary-Espoir en Tête 2012 et sélectionné par le Conseil scientifique de la FRC : Poste d’électrophysiologie et laser impulsionnel accordable. Montant 197 550 euros

Titre du projet : Contrôle spatiotemporel de l’activité neuronale par excitation mono et bi-photonique mise en forme au moyen de l’holographie digitale.

 

Le projet

Une importante révolution technologique se développe depuis le début de 21ème siècle dans le domaine des Neurosciences. La combinaison de méthodes optiques avec l’utilisation d’outils photosensibles exprimés génétiquement (optogénétique) ou non, permet de sonder et contrôler rapidement un grand nombre de mécanismes dans des régions neurales d’intérêt. Moins invasives que les stimulations par le biais d’électrodes, les stimulations lumineuses présentent de meilleurs résolutions spatiales et temporelles, une flexibilité considérable et la possibilité de l’appliquer sur plusieurs sites.

Dans ce projet, l’équipe de Valentina Emiliani propose de construire un système de stimulation lumineuse afin de manipuler des réseaux neuronaux par optogénétique. Une fois développé, ce système a pu être utilisé au cours de différents projets de recherche :

  • Mise en place de la cartographie fonctionnelle des connexions neuronales dans la rétine et dans le cortex visuel. Avec cette approche novatrice, les chercheurs peuvent ainsi étudier le circuit rétinien dans ses détails et déterminer la contribution de différents types cellulaires ainsi que celle des synapses lors du traitement de l’information par la rétine.
  • L’étude de l’association entre les neurones et le tissu sanguin
  • L’analyse des synapses
  • L’étude de l’activité du réseau neuronal

 

L’équipement

 

Le groupe de Valentina Emiliani a contribué au développement de nouvelles méthodes de stimulation optique en mettant en place une classe spécifique de techniques optiques (le contrôle de la distribution de lumière y est opéré par un modulateur de lumière à cristaux liquides).

En 2008, cette équipe de recherche a développé le premier microscope holographique. L’holographie est un procédé d’enregistrement des ondes diffractées par un objet et qui permet de restituer ultérieurement une image en trois dimensions de l’objet. Cette avancée a permis de réaliser des images résolutives dans les tissus épais.

En collaboration avec la compagnie « 3i », le groupe Emiliani a ensuite réalisé un prototype de ce microscope qui a été installé au sein du laboratoire en 2011.

Grâce à l’opération Rotary-Espoir en Tête, l’équipe de Valentina Emiliani a pu complémenter ce prototype afin de permettre la réalisation d’expériences d’électrophysiologie et de la photostimulation bi-photonique.

La réalisation de cet équipement, unique au monde, ouvert à la communauté scientifique est crucial pour valider et promouvoir l’usage de ces nouvelles technologies dans les différents domaines de neurobiologie et permettra à plusieurs chercheurs d’accéder à ces technologies de pointe qui ne peuvent encore être acquises par des équipes individuelles.

Les résultats

Cet équipement a permis la réalisation de plusieurs travaux. Principalement, les chercheurs ont pu avancer dans l’étude du circuit de la rétine. Dans le réseau de la rétine, la lumière est transformée par les photorécepteurs : les sign

aux qui sont générés par stimulation lumineuse vont traverser plusieurs couches cellulaires, en allant des photorécepteurs jusqu’aux cellules ganglionnaires de la rétine, qui envoient, à travers le nerf optique, des messages électriques jusqu’au cortex visuel. En plus de cette transmission verticale à travers des cellules appelées cellules bipolaires, d’autres types cellulaires distribuent les signaux latéralement dans les couches rétiniennes.

Aucun modèle ne peut prédire la réponse des cellules ganglionnaires de la rétine à des stimuli dynamiques complexes. Pour comprendre comment l’information visuelle est transmise des cellules bipolaires aux cellules ganglionnaires, il est nécessaire de stimuler des cellules bipolaires spécifiques et mesurer la réponse au niveau de la cellule ganglionnaire. Cependant, en raison de leur localisation en profondeur dans la rétine, ces cellules sont difficiles d’accès avec les techniques physiologiques usuelles. En utilisant le microscope holographique, les chercheurs ont pu stimuler simultanément les cellules occupant différentes couches de la rétine tout en enregistrant dans la couche de cellules ganglionnaires l’impact de ces stimulations.

En parallèle, d’autres travaux visaient à caractériser des protéines de la rétine, appelées opsines. Grâce à cet équipement, les chercheurs ont pu effectuer pour la première fois une manipulation optique des neurones dans des tranches de cerveaux avec la précision de la milliseconde et à l’échelle de la cellule.

Les équipes utilisatrices

Cet équipement est utilisé à plein temps, et principalement dans des projets développés au sein de l’équipe. Parmi ces projets, un certain nombre sont des collaborations avec des équipes extérieures, dont celles de :

– Dejan Zecevic étudiant les processus physiologiques dont ceux du système nerveux (Ecole de Médecine de Yale)

– Olivier Marre qui cherche à comprendre comment les neurones traitent l’information visuelle (Institut de la Vision, Paris)

– Rosa Cossart dont l’axe de recherche est le développement de réseaux neuronaux au sein du cortex (INMED Marseille)

– Marco Canepari qui étudie le traitement de l’information nerveuse et le fonctionnement des circuits neuronaux (Laboratoire Interdisciplinaire de Physique, Grenoble)

–  Claire Wyart qui cherche à comprendre l’implication de circuits spécifiques de la moelle épinière dans les actes locomoteurs complexes (ICM Paris)

– Edward Boyden développant des outils pour étudier les réseaux neuronaux (MIT Media Lab, Cambridge MA USA)

– Hongkui Zeng développant des logiciels pour accélérer les analyses en neurosciences (Allen Institute for Brain Research)

– Gilles Fortin qui étudie les réseaux neuronaux et leur impact sur la fonction respiratoire (Neuroscience Paris-Saclay Institute (Neuro-PSI))

Valentina Emiliani

« Quand nous avons déposé la demande de financement, la méthode que nous avons inventée n’était pas encore connue et il a été très difficile d’obtenir des financements. Avec le financement du Rotary-Espoir en Tête nous avons pu démontrer la puissance de cette approche. Cela nous a donné une grande visibilité dans un très large communauté de neurobiologistes et nous a ainsi permis d’initier plusieurs nouvelles collaborations et d’obtenir plusieurs financements. Un grand merci ! »

Valentina Emiliani est directrice de recherche. Elle dirige l’équipe « MICROSCOPIE À MODULATION DE FRONT D’ONDE » au sein de l’Université Paris descartes. Le travail de recherche de cette équipe est consacré au développement de techniques optiques reposant sur un certain type de microscopie pour pouvoir les appliquer à la microscopie en neurosciences.

 

Impact du financement

L’acquisition de cet équipement a permis la publication de 7 articles scientifiques dans de très prestigieuses revues telles que Journal of Neuroscience et Nature Neuroscience. Valentina Emiliani a également présenté ses travaux réalisés grâce à cet équipement lors de 25 congrès en France ainsi qu’à l’international.

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