Un babylab pour étudier le développement cognitif et sensorimoteur des nouveau-nés et jeunes enfants

Mis à jour le 05/02/2025

Porteur du projet :  Isabelle DAUTRICHE – Laboratoire de Psychologie Cognitive (LPC, Marseille)

Titre du projet : Création d’un babylab à Marseille : une plateforme expérimentale dédiée à l’étude du développement sensorimoteur et cognitif du bébé et du jeune enfant

Equipement financé grâce à l’opération Rotary-Espoir en Tête 2021 et sélectionné par le Conseil Scientifique de la FRC : une plateforme expérimentale « babylab » (incluant spectroscopie infrarouge, EEG, analyse du mouvement, oculométrie, cabines audiométriques, tapis de marche) pour un montant de 199 827 €

 

« Nous tenons à vous exprimer notre sincère gratitude pour ce financement. Les opportunités de financement spécifiquement destinées à l’acquisition d’équipements de recherche sont rares, malgré des besoins croissants. Nous sommes pleinement conscients de l’engagement des Rotariens à soutenir la recherche, et nous vous en sommes profondément reconnaissants. » – Isabelle Dautriche

Description de l’équipement

 

L’origine et le développement de la communication est une question fondamentale pour les sciences cognitives. En 2019, les Drs. Isabelle Dautriche et Clément François ont été recrutés au CNRS de Marseille et d’Aix-en-Provence pour mener leurs recherches sur le développement du langage chez le nourrisson et l’enfant humain. Avec le Dr. Christine Assaiante, experte en développement sensorimoteur, leur objectif est de créer un pôle de recherche de pointe autour du développement humain, se concentrant sur les capacités cognitives, sensorimotrices et cérébrales du bébé et du jeune enfant qui sous-tendent le développement de la communication.

Un premier pas vers la réalisation de cet objectif est la mise en place d’une plateforme expérimentale spécifiquement dédiée à l’étude des nourrissons humains, un « babylab ». Cette plateforme sera équipée d’un ensemble d’équipements de pointe capables de mesurer l’activité cérébrale (EEG, NIRS) et les réponses comportementales (suivi oculaire, capture de mouvement) dans un environnement contrôlé (cabines insonorisées), chez le nouveau-né et le jeune enfant. Trois projets de recherche, émanant de trois laboratoires différents au sein de l’Université Aix-Marseille, bénéficieront dans un premier temps de cette plateforme partagée. Ces projets auront pour but d’ouvrir de nouvelles perspectives sur l’origine et le développement du langage en lien avec le développement des capacités perceptuo-motrices, à la fois du point de vue comportemental et cérébral :

 

  1. Le projet d’Isabelle Dautriche (Centre de Recherche en Psychologie et Neurosciences, Marseille) aura pour objectif de comparer les enfants humains et les primates non-humains, concernant leur représentation (non-linguistique) du monde et leur capacité de calcul. Les résultats générés par ce projet contribueront à mieux comprendre les fondements cognitifs du langage, un système de communication généralement considéré comme exclusif à l’humain.

 

  1. Le projet de Clément François (Laboratoire Parole et Langage, Aix-en-Provence) vise à étudier les bases neurophysiologiques du développement du langage avec un focus sur l’impact d’une naissance prématurée sur la perception de la parole et les capacités d’apprentissage de nouveaux mots. Ce projet permettra de mieux comprendre les mécanismes de plasticité cérébrale, les liens entre perception précoce de la parole et capacités d’apprentissage de nouveaux mots, l’impact d’une naissance prématurée sur ces processus, et l’identification de biomarqueurs précoces des capacités linguistiques ultérieures.

 

  1. Le projet de Christine Assaiante (Laboratoire de Neurosciences Cognitives, Marseille) aura pour but de déterminer l’impact de l’acquisition de la marche autonome et de ses conséquences fonctionnelles, à la fois dans l’amélioration du couplage précoce perception-action et du contrôle anticipé. Ce projet permettra d’explorer, très tôt, la qualité de ce couplage et son impact dans le développement futur des enfants nés à terme ou avec une naissance prématurée.

 

Ce babylab sera installé sur le campus Saint-Charles à Marseille où un espace a déjà été attribué.  Il permettra de fournir un environnement approprié pour la réalisation des projets individuels des chercheurs locaux du campus, mais aussi d’attirer des experts extérieurs autour de l’étude du développement humain, d’intégrer des réseaux multicentriques et d’accroître la visibilité internationale du laboratoire. Les 3 chercheurs impliqués dans la mise en place de cette plateforme constitueront le comité scientifique chargé d’évaluer et de conseiller les projets de recherche proposés par des scientifiques extérieurs. Cette plateforme sera, à terme, à la base d’un centre de recherche axé sur le développement du bébé qui se développera autour de l’ensemble des projets présentés ici.

 

L’équipement

 

 

 

 

 

 

 

 

Utilisation de l’équipement

La plateforme est exclusivement dédiée à l’étude du développement cognitif et sensorimoteur des bébés de 3 mois à 5 ans. A ce jour, six équipes de recherche ont utilisé la plateforme. Cinq de ces équipes font partie du Centre de Recherche en Psychologie et Neurosciences et la sixième est issue du laboratoire Parole et Langage à Aix-en-Provence. Les chercheurs projettent l’ouverture de la plateforme à l’extérieur.

 

Premiers résultats

Cette plateforme a permis de mettre en place plusieurs études, dont une qui teste à partir de quel âge les enfants commencent à comprendre le sens des phrases (« une pomme saute ») en se basant sur le sens individuel des mots qui la composent (« pomme » et « saute »). Cette étude a été faite dans le cadre du projet du Dr. Dautriche.

La compositionnalité est un concept central des sciences cognitives, car elle offre un cadre systématique pour expliquer comment des éléments simples peuvent être combinés de manière productive pour former des signaux ou des représentations arbitrairement complexes. Les premiers résultats obtenus grâce à l’équipement financé ont permis de mettre en évidence que les enfants de 14 mois comprennent des phrases simples du type « la pomme saute ». Ce résultat suggère que la capacité à comprendre des phrases émergent tôt, potentiellement en même temps que la capacité à comprendre le sens des mots individuels qui la composent. D’autres études sont en cours pour confirmer et avancer cette hypothèse.

Les résultats comportementaux générés par ce projet contribueront à mieux comprendre les fondements cognitifs du langage. Quatre articles ont été soumis et de nombreuses communications orales ont été effectuées.

Le projet de Clément François est en cours et a déjà donné lieu à 2 publications dans des journaux internationaux à comité de lecture et de nombreuses communications. Le projet de Christine Assaiante a commencé en automne dernier.

 

Publications

  • Lê, M., Jover M., Frey A. & Danna J. (en révision). Influence of musical background on children’s handwriting: effects of melody and rhythm. Journal of Experimental Child Psychology.
  • Gupta S., Pequay E., Francois C., Dautriche I., Forms and functions of pre-speech gestures in 12- to 15-months old infants
  •  Hervé, E., François, C., Prévot, L. (2024). Daily auditory environments in French-speaking infants: A longitudinal dataset. Proceedings of the Workshop on Cognitive Modeling and Computational Linguistics. 2024.
  • François, C., Rodriguez-Fornells, A., Cerda-Company, X., Agut, T., Bosch, L. (2024). Impact of late-to-moderate preterm birth on minimal-pair word learning. Child Development.

 

Prochaines utilisations prévues

Les projets sur l’étude du développement de l’enfant continueront : en particulier, Isabelle Dautriche a pour objectif de préciser le format de la pensée chez les bébés. Clément Francois continuera son projet sur les fondements neuronaux du traitement de la parole et cherchera à étudier le rôle de la communication gestuelle dans le développement du langage. De nouveaux chercheurs et de nouvelles chercheuses ont été aussi recrutés dans notre laboratoire grâce à l’attractivité du babylab. Ces chercheuses viennent avec leur propre projet sur le développement des capacités de raisonnement mathématique (à l’école maternelle et l’école primaire) ainsi que sur le développement des prédictions linguistiques chez le bébé.

Crédit photo : © Isabelle Dautriche

Isabelle Dautriche est chargée de recherche CNRS au sein du Laboratoire de Psychologie Cognitive de l’Université d’Aix-Marseille. Ses recherches portent sur l’acquisition du langage et son lien avec la structure des langues naturelles : Comment les enfants apprennent si rapidement le langage ? Et pourquoi les langues ont-elles les propriétés qu’elles ont ? Pour répondre à ces questions, elle s’appuie sur des expériences de psycholinguistique sur les bébés humains et plus récemment sur les primates non-humains qu’elle combine avec des méthodes computationnelles pour étudier la structure des langues.

Témoignage d'Isabelle DAUTRICHE, porteuse du projet :

« Notre ambition est de créer dans les années à venir un pôle de recherche sur le développement typique et atypique de la cognition en lien avec les partenaires locaux (crèches, hôpitaux). Ce pôle aura pour vocation non seulement d’améliorer nos connaissances fondamentales sur la cognition humaine mais aussi de proposer de nouvelles approches diagnostiques pour la détection précoce de troubles développementaux ».

Le centre de recherche

Cette plateforme sera installée au sein du Laboratoire de Psychologie Cognitive de Marseille

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