Comment notre cerveau résiste-t-il au stress ? Le rôle clé d’un protéine découvert
Qu’est-ce qui explique que certaines personnes résistent au stress social chronique, tels qu’un environnement de travail délétère, un isolement social, des relations familiales complexes, alors que d’autres développent des symptômes dépressifs ? Une nouvelle étude publiée dans Nature met en lumière une protéine qui jouerait un rôle clé dans la résilience au stress et contribuerait à répondre à la question.
Une protéine clé, localisée entre autre dans la barrière hémato-encéphalique
La barrière hémato-encephalique permet de protéger le cerveau en empêchant le passage des molécules nocives provenant de la circulation sanguine. Toutefois lors d’un stress prolongé, cette barrière devient « moins étanche », provoquant une inflammation cérébrale associée à des symptômes anxieux et dépressifs.
Dans cette étude, des chercheurs de l’Université de Laval ont démontré qu’une protéine appelée CB1 joue un rôle crucial pour protéger le cerveau contre les effets du stress. Cette protéine, présente dans tout le système nerveux, est notamment localisée dans la barrière hémato-encéphalique, en particulier dans les astrocytes, des cellules du cerveau en forme d’étoile, qui sont un constituant essentiel de cette barrière.
Augmenter la « production » de cette protéine dans cette structure permet de favoriser la résilience
Pour arriver à ce résultat, les chercheurs ont soumis des modèles murins à un stress social chronique et ont montré que chez les souris résilientes au stress, la protéine CB1 était présente de manière plus importante dans les astrocytes de la barrière-hématoencéphalique que chez celles développant des comportements dépressifs. De plus, les chercheurs ont utilisé des outils génétiques pour augmenter cette protéine dans ces cellules en forme d’étoile. Suite à cette augmentation, les modèles murins ont montré une résilience et une diminution des comportements anxieux ; Ces résultats suggèrent que la protéine CB1 contribue à protéger le cerveau du stress.
Ils ont été corroborés par l’étude de cerveaux post-mortem de patients dépressifs : la protéine CB1 est moins abondante dans les astrocytes de la barrière hémato-encéphalique.
L’exercice physique, un moyen d’augmenter cette protéine dans les astrocytes
Les chercheurs ont également montré que la production de cette protéine dans les astrocytes de la barrière hémato-encéphalique, augmentait suite à la prise d’antidépresseurs et de manière intéressante, suite à de l’exercice physique.
Comment cette protéine contribuerait à la résilience au stress ?
La protéine CB1 en maintenant l’intégrité de la barrière hématoencéphalique pourrait expliquer la résilience au stress, c’est-à-dire la prévention de symptômes anxieux et dépressifs induits par un stress chronique.
Un potentiel thérapeutique ?
Ces résultats suggèrent la possibilité d’utiliser des molécules capables d’activer la protéine CB1 dans les astrocytes pour réduire les symptômes d’anxiété et de dépression, et ainsi augmenter la résilience face au stress.
Toutefois, un challenge est de pouvoir limiter l’effet de cette potentielle molécule aux protéines des astrocytes de la barrière hémato-encéphalique, puisque ce récepteur est présent dans les neurones et une activation prolongée de ces récepteurs-là pourraient avoir des effets secondaires.
« En attendant de trouver une molécule agissant spécifiquement sur les récepteurs CB1 des astrocytes, nous pouvons atténuer les répercussions négatives du stress en tirant parti de l’effet protecteur de l’activité physique. », suggère l’auteure principale de l’étude.
Sources :
- A. Dudek et al., Astrocytic cannabinoid receptor 1 promotes resilience by dampening stress-induced blood – brain barrier alterations, Nature Neuroscience, 2025.
- Cerveau et Psycho, « Les récepteurs cannabinoïdes, facteurs de résilience ? », Avril 2025
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Schéma de la barrière hémato-encéphalique
La barrière hémato-encéphalique est une structure protectrice qui régule les échanges entre le sang et le cerveau, empêchant le passage de molécules potentiellement nocives. Les astrocytes, cellules gliales qui soutiennent les neurones, sont des éléments essentiels de cette barrière.
Source : Lafaye, P., Lesuisse, D., & Declèves, X. (2019). Améliorer le ciblage tissulaire des anticorps thérapeutiques par de nouveaux formats. Médecine/Sciences, 35(12), 1106‑1112.
• Qu’est-ce que le système endocannabinoïde ?
La protéine CB1 est un récepteur cannabinoïde.
Le système endocannabinoïde est un ensemble de récepteurs cannabinoïdes – c’est-à-dire des récepteurs du THC (la substance active du cannabis) – et de molécules dont le rôle naturel est progressivement décrypté. Ce système module d’importantes fonctions comme par exemple l’anxiété, la consommation alimentaire et l’équilibre énergétique.